Samedi 24 juin 8 h 30, tout le monde sur le pont. Un des docteurs-miracle de l’ Association, Alain Girard, a sévi et les deux éclopées de la veille sont au départ, fraîches et pimpantes. Il faut dire que cet homme a de l’ or dans les mains et qu’ il a oeuvré sur les Rolland-Pilain de notre ami Claude Delaunay (et sur quelques autres) pour leurs restaurations, il connaît donc nos voitures sur le bout du doigt. En route pour Amboise, sans Claude Rouxel qui assistait à l’ inauguration de l’ exposition à la C.C.I. Si jusqu ‘a la sortie de l’ agglomération tourangelle il est possible de choisir des voies relativement peu fréquentées, à partir de Montlouis et jusqu’ à Amboise pas d’ itinéraire-bis, c’ est la levée de la Loire, toujours très passagère, qui doit être parcourue. Le trajet s’ effectue néanmoins sans problème.
Ce sont aujourd’hui quinze voitures qui vont partir pour Amboise et le nord de la Touraine, sur un itinéraire mis au point par Jean Blanchard, Claude Delaunay et Jean Poussif. Un petit changement au générique toutefois. Jacques Pinguet désirant faire rouler au moins une journée sa type C exposée à la Chambre de Commerce, une permutation est opérée, André-Marc Camus accepte d’ y laisser sa fameuse C23 à la place pour la journée. Il était en effet difficile de brimer le public tourangeau, déjà privé de la 2 litres Grand Prix du Musée de Rochetaillée qui n’ avait pu finalement venir comme cela avait été annoncé, ce qui était d’ autant plus dommage que le Musée nous réservait la surprise de la présenter avec de nouvelles jantes conformes à l’ origine.
A Amboise, nous allons directement jusqu ‘à l’ hôtel Choiseul. Nous sommes accueillis par M.Guerlais, le gérant de ce très réputé établissement, qui nous fait découvrir cette curiosité peu connue, même des Tourangeaux, les « greniers de César » (énormes silos à blé creusés dans la falaise. mais très postérieurs à l’ occupation romaine). Le café-croissant servi dans la galerie menant aux silos est très apprécié. Nous revenons vers le centre d’Amboise pour gagner la place Michel Debré ou le parking nous a été réservé pour la présentation des voitures au public, venu nombreux. C’ est un très beau lieu d’ exposition, au pied des remparts de ce château-forteresse et dominé, 20 mètres plus haut, par la chapelle Saint Hubert ou repose Léonard de Vinci. Puis, selon les aspirations de chacun, visite d’ une fabrique d’ huile de noix ou flânerie dans la ville, ou visite du château, tristement célèbre par son « balcon des conjurés », qui domine la Loire, et ou furent pendus des huguenots au 16éme siècle. Enfin, réception très chaleureuse par le Maire d’Amboise, M. Christian Guyon. Un maire qui connaît bien l’ histoire de la firme Rolland-Pilain pour avoir été au tout début de sa carrière, professeur au collège Rabelais, à deux pas de l’ ancienne usine de la place Rabelais à Tours. Nous quittons le très bel hôtel de Ville avec la promesse que la ville d’Amboise n’ oubliera pas Rolland-Pilain si, un jour elle doit trouver un nom pour une nouvelle rue ou rond-point. Le déjeuner a lieu au Restaurant du Lion d’ Or, un établissement réputé installé sur le quai de la Loire, en face de l’ Ile d’ or ou eut lieu en 496 une rencontre entre Clovis et Alaric (voilà qui ne nous rajeunit pas et nous ramène aux tout débuts de l’ histoire de France…).
Après le déjeuner, nous abordons la partie nord de la Touraine, beaucoup moins visitée que les autres sites de la région et pourtant si attachante, ce qui est injuste mais permet de découvrir les beautés de la campagne tourangelle en dehors des foules qui s’ agglutinent autour des très médiatisés « Châteaux de la Loire ». Une brève indisposition d’ une de nos Rolland-Pilain immobilise la colonne à l’ entrée d’ un village : il est heureux qu ‘elle se soit produite ici plutôt que le matin sur la levée de la Loire . La voiture repart par ses propres moyens et le plateau de la dépanneuse reste donc vierge de tout chargement. Nous faisons étape au château de Beaumont-la-Ronce, ou l’ association A.3P.R. nous reçoit. L’ incontournable vin d’ honneur a lieu dans la tour de guet, « au premier étage » nous annonce-t-on, sans nous préciser qu’ il n’ y a en fait qu’ un seul étage … tout en haut l . Consolation pour ceux qui arrivent essoufflés, la vue plongeante sur l’ alignement de nos Rolland-Pilain est à la fois rare et imprenable.
Et quand la pluie s’en mèle…
Première alerte, trois Rolland-Pilain manquent à l’ appel et pourtant la voiture-balai (la Saab du « Directeur de la course ») et la dépanneuse qui l’ accompagnait n’ ont rien vu sur les bas-côtés.
Grâce aux « portables », les égarés sont localisés rapidement et nous rejoignent. Ils avaient raté un carrefour malgré un « road-book » pourtant remarquablement précis.
Après le repas, première émotion.. mécanique: la direction d’ une RP donne des inquiétudes à son conducteur, manifestant une tendance à l’ indépendance (qui n’ a rien à voir avec les roues du même nom). La voiture est donc chargée sur le plateau, les deux passagers recueillis par d’ autres participants et la promenade se poursuit.
Nous passons devant Ussé, le splendide château de « la belle au bois dormant ». Nos Rolland-Pilain s’ efforcent d’ être les plus silencieuses possible pour ne pas éveiller la belle .Après la cave Angelliaume le matin, c’ est le « musée » de la « poire tapée », une autre spécialité du Chinonais, qui nous attend … Rivarennes. Vidéo sur la manière de fabriquer cet excellent produit et dégustation : la poire séchée est vraiment tapée puis, une fois bien aplatie, elle est trempée dans du vin (de Chinon) pour la faire regonfler. Le résultat est tout à fait remarquable.
Etape suivante : arrêt-buffet à Cheillé, chez nos amis de « La Poule Couasse » dont certains d’ entre nous ont déjà pu apprécier la qualité de l’ accueil en d’ autres occasions. Ce groupe de passionnés de la vie rurale d’ antan rassemble du vieux matériel agricole et fabrique des fouaces et autres galettes et pains d’ autrefois. Dégustation, avec rillettes et autres amuses-bouche du cru, arrosés bien sûr, le tout au son du cor de chasse.
Puis retour sur Tours, via la vallée de l’ Indre et Saché. Après Rabelais, c’ est Balzac qui nous fait les honneurs de son petit coin de campagne, qu’ il chanta avec beaucoup de lyrisme dans « Le lys dans la vallée ». Pour ceux qui préfèrent l’ art moderne à la littérature, on peut y admirer quelques oeuvres du célébré artiste américain Calder, qui était tombé amoureux, lui aussi, de ce site enchanteur.
Au moment de repartir quelques gouttes de pluie commencent à tomber. Les plus avisés remontent leur capote… quand ils en ont . Ce sont alors des trombes d’ eau qui se déversent sur notre colonne. Le plus heureux est le passager du coupé-chauffeur bien installé à l’ abri à l’ intérieur. Quant au chauffeur, n’ en parlons pas, il n’ a même pas de pare-brise pour se protéger ! Bruno Leroux, rédacteur en chef de La Vie de l’ Auto, venu partager cette journée avec nous, pouvait se féliciter d’ avoir choisi l’ abri d’ une voiture fermée. Vaille que vaille, tout le monde parvient à Semblançay, ou la pluie cesse. La commune de Semblançay est bien connue des amis de Rolland-Pilain, puisqu ‘elle fût le centre névralgique du circuit du Grand Prix de l’ ACF de 1923, dans lequel notre marque fit beaucoup plus que de la figuration. Nous sommes accueillis par le maire, Antoine Trystram, qui fut… le premier secrétaire de notre association et se chargea notamment de la tâche, ô combien ingrate, d’ établir nos statuts. Le vin d’ honneur qu’ il nous offre est donc une rencontre de famille.
La pluie reprend sur le trajet entre Semblançay et Parçay~Meslay, ce qui empêche certains d’apercevoir la gare de Saint-Antoine-du-Rocher qui, en 1923, avait déversé des dizaines de milliers de spectateurs sur le circuit du Grand Prix. Une de nos récemment restaurées consomme considérablement plus d’essence que prévu et, à plusieurs reprises, c’est la panne sèche. Ceci entraîne la présence de quelques poussières dans le carburateur, nécessitant un certain nombre d’arrêts. Mais là encore elle n’aura pas besoin de la dépanneuse. C’est doublement heureux car, quelques kilomètres plus loin, une des plus fiables de nos RP, qui n’a jamais connu la moindre panne depuis sa restauration il y a plusieurs années, fait des siennes. Le plateau ne rentrera donc pas bredouille.
Au pays de Rabelais
et de balzac
les RP se mouillent
Etape chaleureuse à Parcay-Meslay
A Parçay-Meslay, le maire, M. Soulisse, M. Couteau, vice président du conseil général et Madame Claude Greff, députée, nous réservent un accueil plus que chaleureux, sous les ovations d’ un nombreux public et même de toute une noce . Des promenades en Rolland-Pilain sont offertes à quelques anciens de la commune pour lesquels cela évoque de vieux souvenirs. Qui en Touraine n’a pas eu un parent qui a travaillé chez Rolland-Pilain ? N’ ayant pu se libérer pour les trois jours du rallye, notre ami Jacques Drogue et son épouse nous font l’ amitié de venir nous retrouver ce soir. Comme nous l’ avions fait à Amboise, nous remettons au maire un exemplaire du livre »Rolland-Pilain, la Voiture des As, l’ As des Voitures » à l’ intention des bibliothèques municipales des deux villes.
Des anciens de Parçay invités à faire un ballade en Rolland Pilain… Le dîner offert par la Mairie, est très animé et très gai. Le retour est animé lui aussi. Alors que le plateau est maintenant chargé, une des deux éclopées de la veille tombe à nouveau en panne. Fort heureusement, nos amis néerlandais Nooteboom, qui sont venus avec leur RP en cours de restauration pour nous la présenter et l’ ont déposée dans la journée à la Chambre de Commerce, ont encore leur remorque attelée à leur Land-Rover : ils peuvent donc charger la pauvre malade.
De l’ entrée nord à la sortie sud de Tours, soit une dizaine de kilomètres, accompagnement de la police, remarquablement fait, voie des bus, feux rouges ignorés, nous traversons la ville sans coup férir et nous nous régalons… Cela peut peut-être paraître mesquin, mais c’ est un petit plaisir pour les automobilistes que nous sommes, nous si souvent brimés, que d’ être ainsi chouchoutés par la maréchaussée et de griller les feux avec sa bénédiction … Encore un peu plus de 110 kilomètresà ajouter aux compteurs de nos Rolland-Pilain. A ce train-là elles seront toutes rôdées d’ ici demain soir. J.B.